Sommet de l’ONU : réaction de Caritas Internationalis et JRS

La réaction de Caritas Internationalis et du JRS à l’égard du document final du Sommet de l’ONU sur la gestion des déplacements massifs de réfugiés et de migrants.

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Nos organisations se félicitent du document final qui sera adopté le 19 septembre 2016 et constitue une avancée importante en vue de la gouvernance mondiale des migrations et du développement. Nous avons depuis longtemps appelé de nos vœux une approche plus humaine, centrée sur la personne, les droits de l’homme et la dignité, à l’égard des migrants internes et internationaux et des réfugiés. Nous nous félicitons de voir l’accent mis sur le respect des droits des migrants et sur le partage des responsabilités en matière d’accueil des réfugiés.

Nous sommes toutefois inquiets face au fossé existant entre de telles déclarations et les politiques et pratiques mises en œuvre actuellement sur le terrain. Nous insistons pour que le Sommet conduise à un véritable changement au bénéfice des migrants et des réfugiés, garantissant leur protection, leur sécurité et leur dignité.

Cela signifie également qu’un changement de pratiques s’impose au sein de l’ONU, afin de garantir que la réponse aux besoins des réfugiés et des migrants soit conforme à la réalité de ces déplacements de personnes. Nous cherchons à répondre de manière intégrée et à long terme aux besoins de ceux qui vivent principalement à l’extérieur des camps. Ils ont besoin de soutien pour assurer leurs moyens de subsistance, y compris les services sociaux, la formation professionnelle et l’emploi. Nous sommes en quête de mesures spécifiques qui puissent maximiser l’efficacité de l’ONU, telles que la répartition des rôles entre l’ONU en qualité de coordinatrice et la société civile en qualité de responsable de la mise en œuvre, et nous demandons également la transparence des pratiques de financement.

Ce Sommet intervient à un moment où l’approche de nombreux gouvernements dans la gestion des déplacements à grande échelle de réfugiés et de migrants est préoccupante. La priorité principale doit être celle de satisfaire aux exigences de protection de base et d’assurer, quelles que soient les mesures adoptées, le total respect du droit international des réfugiés et des droits de l’homme. Et ce n’est pas en construisant des murs, en fermant les frontières et en violant les droits de l’homme et le droit d’asile que l’on y parviendra.

Le Pape François affirme que tous ceux qui cherchent asile sont les bienvenus et doivent être accueillis. Les frontières ont été créées par les gouvernements afin de doter les pays d’un certain niveau de contrôle et de gestion des modèles migratoires. Cela ne devrait empêcher personne de traverser les frontières. Nous avons la responsabilité d’accueillir tous ceux qui sont dans le besoin, sans exception aucune et sans criminalisation.

Le 19 septembre, la communauté internationale doit envoyer un signal fort pour affirmer que les droits de l’homme des réfugiés, des personnes déplacées internes et des migrants ne peuvent être remis en question. Les personnes en fuite devant les conflits, les persécutions, les catastrophes naturelles, les échecs du développement et les effets du changement climatique sont en droit d’exercer pleinement les droits de l’homme qui leur reviennent.

Le droit de ne pas émigrer

A l’heure où les droits de l’homme des réfugiés et des migrants ont été érodés et violés à une vitesse alarmante, il est urgent que tous les Etats membres de l’ONU réunis à New York proclament haut et fort leur engagement sans faille en faveur de la protection et de la sauvegarde de ces droits. Ces engagements devraient rapidement se traduire par la mise en place de politiques conséquentes.

Afin de préserver le droit de chaque personne de vivre dans la dignité, il est crucial que chacune puisse avoir le droit de ne pas émigrer. Il est nécessaire de s’attaquer aux causes à la racine des migrations et des déplacements forcés afin de rendre les migrations sûres et volontaires.

A cet égard nous voulons souligner notre appel en faveur d’un engagement ferme pour parvenir à la Paix en Syrie, où le conflit en cours est à la racine de nombreux déplacements massifs.

Partager la responsabilité

Nous demandons instamment aux nations développées de ne pas utiliser l’aide publique au développement pour couvrir le coût de la présence des réfugiés dans leur pays. Dans certains pays le montant de ces coûts représente plus de 20 % de leur budget d’aide au développement. Nous demandons à tous les pays de cesser de subordonner cette aide aux priorités migratoires du pays donateur.

Nous contestons les déportations et les reconduites forcées à la frontière des personnes, et la reformulation ou la réinterprétation du droit humanitaire et du droit international des réfugiés, dans le but d’empêcher les personnes de demander l’asile ou de faciliter leur expulsion. Les gens sont refoulés vers des pays soi‐disant “sûrs” tels que le Soudan du Sud ou l’Afghanistan. Il faut éviter que d’autres pays qui, pour des raisons politiques ou autres, sont “à risque” soient ajoutés à cette liste.

Certains pays endossent actuellement une part disproportionnée de responsabilité associée aux déplacements massifs de réfugiés et de migrants. Nous demandons instamment à la communauté internationale de partager la responsabilité en matière de protection à l’égard de ceux qui sont obligés de s’enfuir.

Il est significatif que le Pacte Mondial sur les réfugiés propose des solutions aussi bien locales que juridiques en vue de l’admission dans d’autres pays. Toutefois, il n’est plus fait mention du partage des responsabilités, que nous estimons être un élément important marquant la responsabilité conjointe dans la manière de gérer les arrivées massives de réfugiés.

Il est regrettable qu’un engagement visant à faire passer le quota de réinstallation de tous les réfugiés à 10% ait été omis. Il est crucial d’assurer de bonnes conditions d’accueil en évitant la mise en place de camps et en fournissant dès l’arrivée des services adéquats et abordables. Ceux‐ci doivent inclure des informations fiables, des soins de santé, y compris un soutien psychologique, un logement. Les conditions d’accueil doivent également tenir compte de la situation spécifique de groupes vulnérables et garantir leur protection.

Les enfants migrants et réfugiés ne doivent pas faire l’objet de détention et doivent être traités conformément au droit international, notamment la Convention de l’ONU sur les Droits de l’enfant. Nous exhortons les pays à s’attaquer à la traite des personnes et à l’exploitation sexuelle, en particulier celle des femmes et des enfants, qui sont des crimes contre l’humanité.

Il est nécessaire de s’engager de toute urgence en vue d’élaborer un Pacte mondial pour une migration sûre, régulière et organisée, avec un processus, un calendrier et des indicateurs clairs. Il est nécessaire d’accorder à la société civile, y compris les organisations confessionnelles, un espace suffisant en matière d’élaboration de politiques et de leur mise en œuvre.

Faciliter l’accès aux droits de l’homme de tous les migrants

Le meilleur recours contre le racisme et la xénophobie consiste dans la mise en place de politiques d’intégration des migrants et des réfugiés impliquant la participation des communautés d’accueil. Ces politiques devraient faciliter l’accès aux droits de l’homme de tous les migrants, quel que soit leur statut.

La diversité doit être reconnue comme une opportunité et non comme un risque. Nous avons besoin de politiques solides pour combattre le racisme. Tous les peuples devaient renforcer leur solidarité à l’égard de “l’autre”. Nous demandons instamment à la communauté internationale d’appuyer l’initiative du Secrétaire Général des Nations Unies de lancer une campagne mondiale pour combattre le racisme.

Les organisations membres de Caritas Internationalis et du Jesuit Refugee Service travaillent sur la mobilité humaine et la migration forcée. Elles sont à l’œuvre dans les pays d’origine, de transit et de destination. Ce travail comprend la fourniture d’abris et d’éducation, de soins de santé, de conseils psychologiques, de logement, de formation professionnelle, l’intégration avec les communautés d’accueil, le retour durable des migrants, les soins aux victimes de la traite des personnes et l’engagement auprès des décideurs politiques.