We are Belgium too

Depuis janvier, des personnes sans-papiers, dont la situation précaire s’est aggravée à cause de la crise sanitaire, occupent l’église Saint-Jean-Baptiste-au-Béguinage et la cafétaria de l’ULB. Dans la foulée, Sans-Papiers TV, un média indépendant fondé par des sans-papiers dont l’objectif est de raconter leurs histoires personnelles et leurs difficultés au jour le jour, a lancé la campagne «  We are Belgium too  ».

Avec cette campagne, les sans-papiers veulent sensibiliser les Belges à leur situation et leur demandent d’exprimer leur solidarité par le biais d’une pétition. Concrètement, ils veulent rassembler 150.000 signatures  ; une pour chacun d’entre eux. Leurs revendications  ? Pas de «  régularisation collective  », mais bien la régularisation sur base de critères clairs et la création d’une commission indépendante pour ce faire.

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Le JRS-Belgium soutient cette initiative de sensibilisation. Dans son travail au quotidien, le JRS accompagne les migrants forcés se trouvant dans les centres fermés en leur prêtant une oreille attentive, en leur offrant un réconfort et en défendant leurs droits. Nombreux sont les sans-papiers qui sont passés, ou risquent de passer, par la case détention. Notre solidarité avec ces personnes est évidente et notre place aujourd’hui se trouve à leurs côtés.

La fait que cette campagne soit portée par des sans-papiers eux-mêmes lui confère à nos yeux une grande légitimité. Leur objectif de sensibiliser la population à leur situation et leur détresse, à rendre visible l’invisible, est aussi le nôtre  : porter la voix des hommes et des femmes sans voix.

Nos visiteurs en centres fermés rencontrent au jour le jour des sans-papiers qui n’ont pas la possibilité de mener leur vie dans la dignité. Ces personnes vivent parmi nous. Elles travaillent, souvent durement, et leurs enfants vont à l’école. Elles font preuve d’une grande résilience et tentent de s’en sortir. Elles n’ont pourtant ni droit aux aides sociales, ni la possibilité de travailler légalement afin de subvenir à leurs besoins. Ceci les rend inévitablement dépendant du bon vouloir de leurs connaissances, de citoyens emphatiques ou d’associations, mais aussi vulnérables à l’exploitation et à la merci de marchands de sommeil et autres trafiquants. Nous plaidons dès lors pour l’hébergement, l’accompagnement personnalisé et l’orientation de ces personnes. Cet accompagnement doit se dérouler dans un contexte serein  : il s’agit de leur donner espace et temps afin qu’elles puissent pleinement évaluer les possibilités que le cadre législatif leur offre. Cette approche contribue, selon nous, à restaurer leur confiance envers les autorités et les procédures migratoires et les aide à trouver une perspective d’avenir durable, allant du séjour légal en Belgique ou dans un autre pays au retour. C’est toute l’essence de notre projet Plan Together, et nous enjoignons le gouvernement fédéral à s’engager dans ce sens  ; à créer de telles structures d’accueil, d’accompagnement et d’orientation, tel que le suggère par ailleurs l’accord de gouvernement.

Cet accompagnement et ce conseil personnalisé ont néanmoins lieu dans un cadre juridique et réglementaire précis. Notre expérience nous a appris que nombreuses sont les personnes qui se sont retrouvées sans papiers indépendamment de leur volonté, à la suite de procédures migratoires trop longues, trop complexes ou déraisonnablement exigeantes. Elle nous a également appris que les demandes de régularisation via la procédure humanitaire sont souvent traitées de manière arbitraire et opaque. La responsabilité de l’Etat est ici indéniable. En ce sens, nous comprenons la revendication portée par les sans-papiers de mieux encadrer cette procédure de régularisation, par l’inscription de critères dans la loi ou autre, et soutenons cette demande de transparence. Nous plaidons de plus pour des procédures rapides et de qualité, ainsi que pour la création de nouveaux statuts de séjour, par exemple pour les apatrides ou les «  non-rapatriables  », afin que la loi soit mieux adaptée à la dure réalité des choses. La future création d’un Code de la migration annoncée par le gouvernement constitue pour ce faire une belle opportunité.

Développer l’accompagnement personnalisé, adapter la loi aux diverses situations dans lesquelles se retrouvent les sans-papiers et encadrer la procédure de régularisation humanitaire, telles sont, selon nous, les voies à explorer ensemble avec le monde associatif, afin que leur avenir s’éclaircisse.